Gérer les crises

 

 

 

 

Pour tous ceux qui ont déjà frôle l'hiver nucléaire parce que... on a d'ailleurs pas très bien compris pourquoi notre chaton ronronnant s'est transformé en tigre en pleine rage de dent ?

Comment on gère la crise?

Dans les questions qui reviennent souvent, que ce soit avec les enfants à besoins spécifiques ou non, c'est le « comment on le ramène au calme, quand il est hirsute, à hurler ou à balancer des coups de pieds ». Bref comment on le calme, quand il est en crise.

Spoiler alert : On ne peut pas.

Voilà, démerdez vous avec ça.

Bon, je suis sympa, je développe un peu.

Déjà parlons de la crise. Le principe même de la crise, c'est que c'est parti en cacahuète et qu'on est dans une phase où l'enfant ne gère plus ce qu'il ressent. Ça ne sert à rien de lui dire "Oh ! Calme toi un peu !" il ne peut pas. Essayez de vous revisualiser la dernière fois où vous avez vraiment, vraiment pété les plombs. A ne plus vous contrôler. Maintenant essayez de vous imaginer quelqu'un qui vous dit «calme toi et redis moi pareil avec le bon ton ». On a envie de le taper hein ?

 

Au moment de la crise c'est un peu comme un barrage qui lâche. Toute la pression accumulée pendant l'élément déclancheur mais aussi pendant la journée, parfois les jours ou les semaines précédentes, tout se déverse d'un seul coup et inonde d'émotion tout sur son passage. Autant vous dire qu'on peut débarquer à ce moment là avec notre truelle et notre petit bac de ciment, à part attendre que la pression redescende, on va pas servir à grand chose.

Attendre et accompagner. Pour que rien ne se rajoute à ce qui est déjà vécu, pour rassurer l'enfant qui vient de vivre des émotions fortes, qui peut avoir peur des conséquences. Pas de recette miracle, cela dépend de chaque enfant. Certains ont besoin d'une présence physique, d'autre de solitude... tous qu'on mette des mots sur ce qu'ils vivent et qu'on leur dise après coup qu'on les aime.

Bon du coup on fait quoi ? Parce qu'on va pas rester là à se tripoter la fatalité !  

Chaque personne a des vulnérabilités. Dans l'enfance elles sont encore à vif, on ne s'est pas (éventuellement) désensibilisé, on n'a pas musclé nos stratégies de compensation, et soyons honnête, la journée d'un enfant c'est souvent hardcore. Du coup il cumule, un peu comme une cocotte minute se rempli de pression. Et s'il n'y a pas le petit sifflet qui fait sssshhhhhhhttttttt, ben à la fin, il pète. Alors nous on se dit que quand même, on l'aime, mais il est un peu relou, parce que C'EST PAS SI GRAVE SI C'EST PAS LE VERRE BLEU CE SOIR, mais on voit pas que dans la journée il a stressé parce qu'il était pas sur de sa place pendant l'appel, il a flippé parce que ses verticales étaient un peu de travioles, il a été déçu à la récréation parce qu'il a perdu la course et que le copain s'est moqué de lui. Du coup, il s'assoit à table avec tout son magma d'émotions contenues, dont il ne sait pas quoi faire parce qu'il n'a pas les capacités de les organiser et d'en parler, et quand il voit que son verre TOUJOURS bleu ne l'est pas, c'est la stabilité de trop absente dans sa journée et c'est la fin du monde. Et une fois que t'as commencé à ouvrir les vannes...

De même c'est faaatigant, chouquette crise à chaque sortie du bain du soir, pour tout et n'importe quoi. A se demander si elle cherche pas une EXCUSE pour péter les plombs et « faire une colère ». Là non plus on ne voit pas forcement que chouquette est très sensible, que sa journée est un koh lanta émotionnel. La copine qui ne veut pas jouer avec elle, la maîtresse qui a fait les gros yeux, la voisine qui est venue parler avec qu'elle ne s'y attendait pas, le brouhaha de la collectivité alors qu'elle est sensible au bruit... Le soir au bain c'est le moment de calme, c'est un tête à tête avec un adulte de confiance, c'est le corps qui se relâche parce que c'est le soir, parce que l'eau et chaude, parce qu'on fait un câlin en la séchant.

 

Et Paf la crise, qui est un mécanisme essentiel pour évacuer tout ce trop plein qui deviendrait toxique si elle le gardait à l'intérieur.

Ça nous dit pas ce qu'on fait, et je ne vais pas vous donner de clés en plus (tant de lecture pour ça!) mais je voulais vous amener à réfléchir que ce n'est pas la crise que l'on gère, c'est toutes les petites marches d'avant, pour éviter d'arriver en haut du grand escalier du JenPeutPlus.

 

Ça signifie bien connaître la personne (coucou les administratifs qui pensent que les professionnels sont interchangeables sans conséquence), ses vulnérabilités, ses micro signes de mal être et du coup, comment elle est quand elle va bien. Ça paraît con, mais t'as des gamins, quand ils vont bien ils crient partout en escaladant les murs. T'en a d'autres qui restent calment sur un canap avec des livres. Et le comportement des autres est leur signe de mal être à eux.

Une fois qu'on connait les signes de l'enfant qui monte en pression, il faut lui trouver des petits trucs qui l'aident à redescendre, et là aussi ce sera personnel. Peut être un temps calme où on fait un massage des mains en rentrant de l'école. Peut être 15 minutes de draisienne à fond les ballons. Peut être un moment où on l'aide à se souvenir des événements de la journée pour en parler... Encore une fois si je n'ai pas d'outils clé en main à vous offrir, c'est sur cette période là, la montée en pression, que vous allez pouvoir influer. C'est aussi ce moment où vous pouvez verbaliser ce que vous voyez. « Regarde tu joues en faisant plus de bruit que d'habitude, je pense que tu commences à fatiguer de ta journée. Peut être qu'on peut choisir 3 livres à lire pour se poser un peu ? » Peut être que le crapaud en question va faire comme la mienne et tout nier en boucle (oooon est pas fatiguééeuuuh ) mais petit à petit cela va aider l'enfant à reconnaître ses propres signes de trop plein pour que plus tard il puisse de lui même utiliser une astuce pour faire redescendre la pression pour qu'il devienne autonome dans sa gestion de ses émotions...

Alors on va régulièrement se rater hein, c'est la base de l'éducation, être à la rue. Mais on croit en nous, et petit pas après petit pas, on va trouver nos propres trucs et nos astuces !


Voilou j'espère que cet article vous aura inspiré ! Et comme toujours, si vous ne voulez rien rater du blog  rejoignez nous sur la page facebook du blog, ou inscrivez vous à la newsletter !

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Commentaires: 1
  • #1

    Notsil (jeudi, 10 octobre 2019 17:21)

    Ah ah ça me parle tellement :) Une enfant "normale" ici (j'aime pas ce mot mais disons qu'elle n'a pas de souci particulier ni d'hypersensibilité tout ça ^^) mais qui décharge bien :) Bon, elle grandit donc heureusement on a moins de crises ( 1à 2 / jour en pics, mais plus souvent 1 à 2 fois par mois), mais quand elle ne verbalisait pas vraiment c'était une 10aine par jour.
    Donc les hurlements, le refus de tout accompagnement (impossible de chercher à rassurer par un câlin ou autre), juste rester là à attendre que ça passe (20-40 min faut avoir le temps chaque fois...).

    Ce qui serait intéressant, ça serait aussi de voir comment l'adulte fait pour absorber tout ça. Parce que c'est usant. Je l'ai vu, la 1ère crise on attend, puis le câlin / pleurs salvateurs (puis l'enfant passe direct à autre chose c'est impressionnant...) ; la 2ème on a un peu plus de mal, et à la fin de la journée, l'adulte patient et empathique du début ne l'est plus :) Ce n'est pas toujours possible d'être entouré, et difficile de prendre du temps pour soi et se recharger quand on est autant accaparé :)

    Chez nous il y a rarement moyen d'éviter la crise (j'ai à peu près tout tenté ^^) ; elle a besoin que ça sorte. Maintenant en verbalisant ou en posant des questions sur ce qui semble la gêner, on peut passer directement aux pleurs / câlins dans les bras, et faut avouer que c'est plus agréable pour tout le monde :)

    Article très intéressant en tout cas ;) Merci !