Pourquoi continuer à travailler les nouveaux acquis

 

 

 

Ne comptez pas les points !

Aujourd'hui je voulais vous parler de pourquoi il faut présenter (longtemps, souvent, dans différents contextes) les nouveaux acquis. Ça tombe bien, ça évite de devoir chercher trop de nouvelles choses les unes après les autres, on peut aussi se reposer sur ce qui est en cours.

Imaginons. Choupette commence à s'intéresser à la lecture. Bim, elle vient de sortir le son des lettres de l'alphabet (pas leur nom) et comprend la combinatoire. Là on se dit banco, on fait les syllabes, et dans 3 jours on fait peter les mots complets. Et va savoir pourquoi, alors qu'elle est capable de nous lire une syllabe, le mot lui il ne sort pas. 

T'as beau lui remontrer ta carte avec ta plus belle calligraphie, en couleur et tout, que dalle, ça marche pas. Tu te retrouves avec ce genre de dialogue :

- Elle fait quoi la premiere syllabe ?

- Jjjjjjjjjuuuuuu

- Et la deuxieme ?

-pppppppeuuuuh

- Alors c'est quoi le mot ?

- peuuuuh...tit ? petit ?

- Mais non ! Relis ta première syllabe !

- Jjjjjjuuuu ?

- Alors ce mot ?

- Juuuu… lie ?

Là, même si t'aime bien sa copine Julie, t'as envie de faire une pause et bouffer un abat jour.

Deuxième exemple, Loulou qui sait bien dénombrer, qui comprend le principe d'ajouter, mais qui cafouille systématiquement sur les fiches dessus. Si on prend 2 billes, qu'on les mets dans un panier avec 4 billes il peut dire que ça fait 6 billes. Mais là que dalle. Soit il compte tous les points soit il se plante. Pas moyen de lui faire dire que 2 + 4 ça fait 6.


 

 

 

De quoi te rendre :

(jeu de mot particulièrement nul)


Mais c'est parce qu'on a tendance à oublier un truc : Accéder à un nouvel acquis, et l'avoir automatisé ce n'est pas la même chose. Lorsque ton cerveau voit les cartes en photo, il n'a pas besoin de compter. Automatiquement si je te montre la carte il va dire qu'il y a 2, ou 4. Il a retenu cette information et la traite de manière automatique. Tellement que si je te montre une carte en te disant de ne pas compter les points, tu ne peux pas t'empêcher de savoir qu'il y en a deux.

Idem pour la lecture. Si je te sors la carte "Ju" dans ton cerveau ça fait "Ju". Tu n'as pas besoin d'aller chercher en mémoire le son du "J" et le son du "U" et de réfléchir pour savoir que ça va faire "ju". C'est automatique. L'histoire moderne de l'humanité est émaillée de séparations dues à la lecture automatique trop rapide d'un message apparut sur un écran de smartphone.


 

 

 

 

On ne fait pas que percevoir les informations, on les traite aussi.


Mais revenons à Choupette et Loulou. Ils ont donc un acquis, ils savent le faire, mais ce n'est pas automatisé. Et ça c'est la clé du problème.

Notre traitement de l'information ne fonctionne pas sans rien. Notre cerveau n'est pas une couturière corvéable à souhait que tu peux, avec un peu de pression sociale, faire travailler sans relâche et sans bénéfice (alors que les industriels eux peuvent vendre. #AcheteTonMasque). Pardon, je digresse. Donc ce n'est pas automatisé, et l'enfant va devoir compenser ça par de l'attention et du traitement en mémoire de travail.

Imaginons que le cerveau fonctionne à l'aide de petits bonhommes. On a un nombre max de petits bonhommes mobilisables. Choupette doit lire le mot Jupe. Elle commence par devoir se souvenir le son de "J" (hop, petits bonhommes) et le son de "U" (hop d'autres petits bonhommes qui tiennent). Une troisième vague de petits bonhommes viennent combiner le tout pour faire "Ju". Et il faut des petits bonhommes pour tenir l'information en mémoire. Jusque là tout va bien.

Mais voilà arriver le "Pe". On appelle des petits bonhommes pour le son "P" et d'autres pour le "E" et là ça commencer à être la merde alors tant pis, on dit aux premiers bonhommes de "ju" de tout lâcher pour venir aider les copains. Banco on y arrive, elle sort "peuuuh". Sauf que y avait plus personne pour tenir le "ju" qui a disparut.

On peut alors la relancer sur le "Ju" mais elle risque de devoir faire lâcher les bonhommes du "peuh" pour aider les premiers. Vu que Choupette est cool, elle va tenter de nous trouver un mot avec ce qu'elle a conservé en mémoire.


 

 

 

 

 

 

Dans le cerveau de Choupette on ne connait pas la distanciation sociale. 


Ce qui met Choupette et Loulou en échec pour la suite, ce n'est pas de ne pas avoir compris un concept, c'est de devoir traiter touuute l'information de manière volontaire. La solution est alors de faire un grand nombre de présentations pour automatiser l'acquis. Si quand elle voit "ju" elle a un seul bonhomme qui prend un air blasé pour dire "ça fait ju" et pas tout un groupe de travail qui arrive à ce son, c'est autant de petits bonhommes qu'elle peut allouer au reste. Et donc maintenir en mémoire et donc traiter plus d'information.

Donc on présente plein de fois, dans pleins de couleurs, de contextes. Et quand on nous dit (même notre petite voix intérieure) "mais il sait pas déjà le faire ça", on peut répondre d'un air fier "on ne stagne pas, on automatise".


Voilou, ça faisait longtemps que je n'avais pas fait un peu de vulgarisation théorique. J'espère que c'était compréhensible ! Et comme toujours, si vous ne voulez rien rater du blog  rejoignez nous sur la page facebook du blog, ou inscrivez vous à la newsletter !

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Commentaires: 1
  • #1

    Notsil (mercredi, 13 mai 2020 17:37)

    Quand je vois que ça fait 2 mois du coup qu'on bosse sur la décomposition de 10, qu'elle bloque encore à 4+2 ("je sais paaaaas" dit-elle en levant les yeux au ciel en mode j'attends une révélation divine)... bon, ton article fait du bien ^^ On va continuer le boulier et afficher sur les doigts (mais elle devrait y penser, non ? ^^).
    Et rester zen.